Menu Fermer

Écomusées

Les écomusées sont un concept muséal qui a émergé en France au début des années 1970, notamment grâce au travail de George Henri Rivière et Hugues de Varine (Borrelli & Dal Santo, 2023). La préparation de la 9e Conférence Générale de l’ICOM (Conseil International des Musées) à Paris et Grenoble a été un moment clé dans la création du terme (Borrelli & Dal Santo, 2023). Cependant, un tournant important a été la Conférence de Lurs (Provence) en 1966, qui a défini une nouvelle manière d’appréhender le patrimoine naturel et culturel en France, conduisant à la création des parcs naturels régionaux qui prenaient en compte la participation et la revalorisation des communautés locales et de leur patrimoine culturel (Borrelli & Dal Santo, 2023). Ces premières expériences sont considérées comme faisant partie de la première génération d’écomusées, souvent liées aux parcs naturels régionaux (Borrelli & Dal Santo, 2023).

Entre 1971 et 1974, la deuxième génération d’écomusées a vu le jour, élargissant leur portée au développement communautaire et à la relation des êtres humains avec leur environnement (Borrelli & Dal Santo, 2023). L’écomusée du Creusot (1971) a marqué une étape importante en tant que premier écomusée urbain et communautaire, non associé à un parc naturel régional (Borrelli & Dal Santo, 2023).

Contrairement au modèle muséal traditionnel défini par Hugues de Varine comme BÂTIMENT + COLLECTION + VISITEURS, l’écomusée est conceptualisé comme TERRITOIRE + PATRIMOINE + HABITANTS (Borrelli & Dal Santo, 2023). Cette définition met en évidence un changement fondamental où l’objet du musée devient le sujet : les personnes et les communautés (Borrelli & Dal Santo, 2023). L’objectif est de transformer le processus muséal en un moyen de participation directe de l’individu et de la communauté, ainsi qu’un outil pour le développement intégral du patrimoine et du territoire (Borrelli & Dal Santo, 2023). Les écomusées sont conçus pour être au service de la société et de son développement à long terme (durable) dans les domaines social, culturel et économique (Borrelli & Dal Santo, 2023).

Les fonctions et les objectifs des écomusées sont multiples (Borrelli & Dal Santo, 2023) :

  • Encourager les rencontres et les initiatives communautaires et être un outil de développement culturel, social et économique des territoires et des communautés.
  • Promouvoir la participation communautaire dans les processus muséaux.
  • Se concentrer sur une région géographique spécifique et sur le bien-être des habitants locaux.
  • Valoriser les connaissances ancestrales des communautés et promouvoir des valeurs de respect, de coexistence, d’empathie et de collaboration.
  • Soutenir les communautés et les petits producteurs en développant les compétences, en offrant des opportunités d’emploi et en créant des marchés pour leurs produits. Ils visent également à éviter les problèmes créés par le tourisme de masse ou non durable.
  • Stimuler la conscience écologique, la cohésion sociale et les économies locales en promouvant la relation entre la culture et l’environnement.
  • Être des espaces d’éducation et de sensibilisation, notamment en ce qui concerne la pédagogie globale en lien avec leur population locale.
  • Être des outils critiques qui créent leurs propres récits et favorisent le respect de soi et la valeur des connaissances locales. Ils peuvent également agir comme catalyseurs de changement culturel.

Le concept d’écomusée est étroitement lié à la durabilité et aux Objectifs de Développement Durable (ODD) des Nations Unies (Borrelli & Dal Santo, 2023). De plus en plus d’institutions culturelles et de musées, y compris les écomusées, s’engagent dans des pratiques et des actions liées à la durabilité et à la transition écologique (Borrelli & Dal Santo, 2023). Le projet européen Ecoheritage estime que les écomusées peuvent contribuer à la réalisation des ODD et à l’action climatique (Borrelli & Dal Santo, 2023). Des études menées en Espagne montrent que les ODD prioritaires pour les écomusées sont notamment l’éducation de qualité, l’égalité des sexes, l’énergie propre et abordable, le travail décent et la croissance économique, les villes et communautés durables, la consommation et la production responsables, et l’action climatique (Borrelli & Dal Santo, 2023). L’Ecomuseu Ilha Grande au Brésil articule son travail dans une perspective de développement socio-environnemental durable en lien avec les ODD (Borrelli & Dal Santo, 2023).

De nombreuses pratiques illustrent l’approche des écomusées (Borrelli & Dal Santo, 2023) :

  • L’Ekomuzeum « Dziedziny Dunajca » en Pologne met en œuvre des actions pour la durabilité environnementale, notamment en promouvant des activités sans voiture et des produits locaux.
  • L’écomusée de Parabiago en Italie utilise un modèle pour orienter son travail vers des impacts durables et co-créatifs.
  • L’Ecomuseu Ilha Grande encourage la participation à travers des formations et des projets communautaires comme « Conhecendo a Nossa Ilha » et « Museólogas de Família ».
  • L’Ecomuseo Martesana se concentre sur la navigation comme moyen de transport non polluant et pour promouvoir le tourisme doux.

L’émergence du concept d’écomusée représente une évolution par rapport aux musées traditionnels (Borrelli & Dal Santo, 2023). Les écomusées sont perçus comme ayant un avantage pour promouvoir la durabilité et l’action climatique en raison de leur ancrage territorial et de leur préoccupation pour le bien-être des populations locales (Borrelli & Dal Santo, 2023).

Enfin, dans le contexte de l’Anthropocène, les écomusées et les musées de société sont appelés à jouer un rôle en construisant de nouveaux récits, en réinterprétant les collections et en promouvant des modes de vie alternatifs (Chaumier, 2024). Certains envisagent même l’application des principes de la décroissance au sein des musées face aux problèmes d’accumulation et de conservation (Latouche, 2021). L’écomuséologie est considérée comme particulièrement actuelle et urgente pour réinventer les manières de faire et les raisons d’espérer (Chaumier, 2024).

Bibliographie :

Borrelli, N., & Dal Santo, R. (Orgs.). (2023). Ecomuseums and climate change. Ledizioni.

Chaumier, S. (2024, décembre). Construire de nouveaux récits et proposer de nouvelles missions sociales pour les écomusées et musées de société. Nouveaux récits des écomusées et musées de société, RÉFLEXIONS ISSUES DES RENCONTRES PROFESSIONNELLES DE LA FEMS 2024, 10–19.

Latouche, S. (2021). Muséologie et décroissance. La Lettre de l’OCIM, 196, 38–43. https://doi.org/10.4000/ocim.4440