Dans les musées, l’intégration du développement durable est un phénomène qui s’est progressivement imposé, notamment depuis les années 2000, face aux défis de la durabilité, de l’arrivée de nouveaux outils de gestion et de la révolution numérique (Porcedda, 2021). Bien qu’il n’y ait pas eu de réelle rupture organisationnelle, on a observé une mise en œuvre progressive de nouveaux outils et pratiques (Porcedda, 2021).
Plusieurs facteurs motivent cette intégration. Il y a des obligations réglementaires et légales, ainsi que la pression de l’opinion publique (Porcedda, 2021). Pour certains, le développement durable est considéré comme un concept intégrateur qui permet de repenser l’organisation muséale (Porcedda, 2021).
La mise en œuvre du développement durable dans les musées peut prendre différentes formes : Il peut être utilisé comme thème principal des activités culturelles et éducatives, créant des liens avec les communautés (Porcedda, 2021) ; il peut se traduire par la recherche interdisciplinaire et la conservation préventive (Porcedda, 2021).
L’écoconception des expositions et des bâtiments (comme la création de bâtiments certifiés LEED) et l’adoption de gestes écoresponsables sont d’autres manifestations (Porcedda, 2021).
Enfin, on observe une tentative de changer le style de gestion vers plus d’inclusion et de transversalité (Porcedda, 2021).
La responsabilité sociale du musée est également liée au développement durable. Elle ne se limite pas à l’amélioration des conditions de conservation du patrimoine et à l’écoconception, mais elle prend aussi en compte les effets sociaux des actions du musée, comme l’amélioration des conditions de vie et de travail des professionnels et la relation avec les parties prenantes (Porcedda, 2021).
Cependant, l’intégration du développement durable peut rencontrer des défis et des paradoxes (Porcedda, 2021). Il doit composer avec ses propres métamorphoses et intégrer la remise en question et le débat au cœur de ses pratiques (Porcedda, 2021). Pour être réellement stratégique, une démarche de développement durable doit conduire à un renouvellement des règles en vigueur (Porcedda, 2021).
L’analyse de trois musées (le Muséum national d’Histoire naturelle de Paris, les Muséums nature de Montréal et le Musée de la civilisation de Québec) montre que l’intégration du développement durable se fait selon deux positionnements stratégiques types (Porcedda, 2021) :
- L’écosensible adopte une politique durable pour en tirer un avantage concurrentiel.
- L’écodéfensif se limite au strict respect des contraintes légales sans anticiper.
Il est apparu que le Muséum national d’Histoire naturelle et les Muséums nature de Montréal étaient plutôt écodéfensifs, tandis que le Musée de la civilisation tendait vers une approche écosensible, avec le risque de revenir à une approche écodéfensive (Porcedda, 2021). La question de l’identité du musée (scientifique ou sociale) influence les actions entreprises (Porcedda, 2021). Bien que le développement durable ait été considéré comme valide et digne d’être enseigné, il n’a pas toujours transformé la culture organisationnelle de manière permanente et a parfois été perçu comme une obligation administrative (Porcedda, 2021).
Malgré la reconnaissance croissante de la culture dans les programmes de développement durable au niveau international et régional (comme l’Agenda 21 de la culture au Québec), la notion de durabilité culturelle ne semble pas encore être une priorité pour les musées (Porcedda, 2021). David Throsby propose des principes de durabilité (équité, diversité culturelle, précaution, interdépendance des systèmes et protection des biens culturels) qui pourraient être appliqués au patrimoine culturel (Porcedda, 2021).
Face au développement durable, les musées peuvent adopter différentes attitudes : le rejet, le statu quo (écoblanchiment), ou une redéfinition des relations entre les professionnels (Porcedda, 2021). Le changement vers un modèle de gestion durable nécessite l’appui et l’engagement de tous (Porcedda, 2021). Le concept d’isomorphisme institutionnel peut expliquer pourquoi différentes organisations adoptent des comportements similaires dans un contexte d’alignement sur le marché (Porcedda, 2021).
Pour Porcedda (2021) le développement durable représente un enjeu contemporain majeur pour la gestion culturelle des musées, les poussant à adapter leurs stratégies et pratiques face aux défis environnementaux, sociaux et économiques.
Bibliographie :
Porcedda, A. (2021). La gestion culturelle des musées au prisme du développement durable: Évolution et enjeux contemporains. Muséologies: Les cahiers d’études supérieures, 10(1), 117. https://doi.org/10.7202/1093112ar